mercredi 8 janvier 2025
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Scarlett Johansson accuse OpenAI de copier sa voix : une controverse qui interroge les limites de l’IA

Scarlett Johansson s’insurge contre OpenAI, accusant la société d’avoir utilisé une voix synthétique ressemblant étrangement à la sienne pour son chatbot ChatGPT. Après des menaces de poursuites judiciaires, OpenAI a suspendu l’utilisation de la voix controversée. Cette affaire soulève des questions cruciales sur les droits d’image et les enjeux éthiques de l’intelligence artificielle.

Une voix synthétique qui fait polémique.

La controverse a éclaté la semaine dernière lorsque OpenAI a présenté une mise à jour de son chatbot vocal, ChatGPT, intégrant une voix nommée « Sky » qui a rapidement été comparée à celle de Scarlett Johansson. L’actrice, célèbre pour son rôle dans le film Her (2013) où elle prêtait sa voix à une intelligence artificielle, a exprimé son indignation face à cette ressemblance frappante. Johansson a affirmé qu’OpenAI avait tenté de la recruter en septembre 2023 pour ce projet, une offre qu’elle avait déclinée.

Dans un communiqué relayé par les médias, l’actrice a déclaré : « Quand j’ai entendu la démo publiée, j’ai été choquée, en colère et incrédule que M. Altman [PDG d’OpenAI] ait mis au point une voix qui ressemblait si étrangement à la mienne que mes amis les plus proches et les médias ne pouvaient pas faire la différence. » Johansson accuse également Sam Altman d’avoir intentionnellement encouragé cette comparaison en publiant sur Twitter le mot « her », une référence explicite au film Her.

OpenAI suspend l’utilisation de la voix « Sky ».

Face à la polémique grandissante et sous pression juridique, OpenAI a annoncé le 20 mai la suspension de la voix « Sky ». Dans un communiqué, Sam Altman a déclaré : « Par respect pour Mme Johansson, nous avons suspendu l’utilisation de la voix de Sky dans nos produits. Nous nous excus ons auprès de Mme Johansson pour ne pas avoir mieux communiqué. » OpenAI a toutefois nié toute intention de copier la voix de l’actrice, affirmant que « Sky » avait été développée à partir d’une autre actrice professionnelle. La société a également publié un billet de blog détaillant le processus de création de ses voix synthétiques, parmi lesquelles « Breeze », « Cove », « Ember », « Juniper » et « Sky ».

Malgré ces justifications, Johansson a maintenu sa position, expliquant avoir été contrainte d’engager des avocats pour enquêter sur la manière dont la voix avait été créée. Pour de nombreux experts, cette affaire met en lumière les dangers croissants des deepfakes et de l’utilisation abusive des droits à l’image et à la voix à l’ère de l’intelligence artificielle.

Une affaire symptomatique des défis juridiques et éthiques de l’IA.

Cette controverse n’est pas un cas isolé. OpenAI fait face à de multiples poursuites judiciaires pour l’utilisation présumée non autorisée de contenus protégés par le droit d’auteur lors de l’entraînement de ses modèles d’IA. Parmi les plaignants, on retrouve des figures influentes comme George R.R. Martin, auteur de Game of Thrones, ainsi que des institutions comme le New York Times.

Selon les experts juridiques, Johansson pourrait avoir une base solide pour poursuivre OpenAI, notamment en s’appuyant sur les lois californiennes sur le droit à l’image et à la voix. Ces lois interdisent l’utilisation non autorisée de l’identité d’une personne, y compris sa voix, à des fins commerciales. Des cas précédents, comme ceux impliquant les artistes Bette Midler et Tom Waits, renforcent la légitimité d’une telle démarche.

Dan Stein, directeur d’une société spécialisée dans la protection des droits vocaux, a souligné : « Utiliser la voix d’une personne sans son consentement est particulièrement invasif, surtout à une époque où la méfiance envers l’IA est omniprésente. » Johansson elle-même a déclaré : « À une époque où nous sommes tous aux prises avec les deepfakes et la protection de notre propre image, de notre propre travail, de notre propre identité, je pense que ces questions méritent une clarté absolue. » L’actrice appelle également à une législation plus stricte pour protéger les droits individuels face à l’essor des technologies génératives.

Un impact économique et technologique à surveiller.

Au-delà des enjeux juridiques, cette affaire illustre les tensions croissantes entre les industries créatives et les entreprises technologiques. Le développement rapide des outils d’intelligence artificielle offre des opportunités inédites, mais soulève également des préoccupations sur la rémunération équitable des artistes et la protection de leur image.

Dans le domaine du sport, par exemple, des discussions ont déjà lieu pour encadrer l’utilisation des droits de nom, d’image et de voix des athlètes. Tim Slavin, directeur juridique de OneTeam Partners, a récemment déclaré : « Nous avons évité les conflits formels jusqu’à présent, mais je ne sais pas combien de temps cela durera. Il y a des conversations difficiles à venir. »

Par ailleurs, cette polémique pourrait également avoir des répercussions sur l’économie des technologies de l’IA. OpenAI, l’un des leaders mondiaux du secteur, est sous pression pour équilibrer innovation et respect des droits des créateurs. Les entreprises devront désormais naviguer dans un cadre légal de plus en plus strict, tout en répondant à une demande croissante pour des expériences numériques immersives.

Une affaire qui pourrait redéfinir les règles.

L’affaire Scarlett Johansson contre OpenAI pourrait bien devenir une jurisprudence clé dans le débat sur les droits d’image et d’identité à l’ère de l’intelligence artificielle. Alors que la législation peine à suivre l’évolution rapide des technologies, ce cas met en lumière la nécessité d’établir des règles claires pour protéger les créateurs et les individus contre les abus potentiels.

En attendant, Johansson reste ferme : « Ces questions méritent une attention immédiate et approfondie. Je suis impatiente de voir des lois adaptées pour garantir la protection des droits individuels face à ces nouvelles technologies », a-t-elle déclaré.

Avec des entreprises comme OpenAI en première ligne, cette affaire pourrait accélérer les discussions autour de la réglementation de l’intelligence artificielle. Les législateurs aux États-Unis et dans d’autres pays travaillent déjà sur des propositions comme le NO FAKES Act ou le No AI Fraud Act, qui visent à encadrer l’utilisation des outils génératifs pour éviter les abus. Cependant, ces projets de loi sont encore loin de répondre à toutes les préoccupations soulevées par des cas comme celui de Scarlett Johansson.

La question reste ouverte : jusqu’où les entreprises technologiques peuvent-elles aller dans leur quête d’innovation avant de franchir les limites éthiques et légales ? Scarlett Johansson, par sa notoriété et son influence, pourrait bien jouer un rôle déterminant dans la redéfinition des droits de propriété intellectuelle et des protections contre les abus liés à l’intelligence artificielle, ouvrant la voie à une réglementation plus stricte et adaptée à cette ère numérique.

Passionné par l'innovation technologique et les marchés financiers, Alex Martin décrypte les tendances qui façonnent notre avenir. Avec plus de 10 ans d'expérience en analyse économique et un regard aiguisé sur les révolutions numériques, il…