mercredi 8 janvier 2025
Technologie

Mayotte : Starlink et Orange au cœur de la reconstruction des réseaux après le cyclone Chido

Alors que l’île de Mayotte se remet péniblement du passage dévastateur du cyclone Chido, les initiatives pour rétablir la connectivité suscitent autant d’espoirs que de controverses. Entre l’intervention d’Elon Musk avec Starlink et les efforts des opérateurs français comme Orange et SFR, les tensions s’intensifient autour des choix stratégiques pour reconstruire les infrastructures télécoms.

Starlink : une solution d’urgence, mais controversée.

Dans un geste inédit, l’entreprise Starlink, propriété d’Elon Musk, a proposé à l’État français de prêter 100 kits de connectivité satellite pour aider Mayotte à retrouver un accès à Internet. Ces kits, dont le coût unitaire est estimé à 349 euros, seront offerts, tout comme un abonnement gratuit pour trois mois fixé à 70 euros par mois sur l’île. En parallèle, 100 kits supplémentaires seront pris en charge par le gouvernement français. Cette opération, annoncée par François Bayrou, vise à fournir une connectivité d’urgence dans des zones encore sinistrées.

Si cette solution a été saluée pour sa rapidité de mise en place et son efficacité dans des zones isolées, elle a également suscité des critiques. Laurentino Lavezzi, directeur des affaires publiques chez Orange, a exprimé des réserves sur ce choix, soulignant que les opérateurs locaux étaient déjà pleinement mobilisés pour rétablir les réseaux terrestres. « Mettre en lumière cette solution, c’est un peu choquant », a-t-il déclaré, dénonçant un manque de reconnaissance pour les efforts déployés par les acteurs français.

Les opérateurs français en première ligne.

Malgré l’arrivée de Starlink, les opérateurs locaux continuent d’intensifier leurs efforts pour reconnecter Mayotte. Orange, par exemple, a annoncé avoir rétabli la connectivité mobile pour 90 % de la population au 6 janvier 2025. SFR et Only (filiale de Xavier Niel) affichent également des progrès significatifs, notamment avec une couverture respective de 88 % et 75 % des habitants. Ces résultats témoignent d’un travail acharné sur le terrain, parfois entravé par des défis logistiques majeurs, comme l’approvisionnement en électricité ou les infrastructures endommagées.

Pour les opérateurs, l’intervention de Starlink est perçue comme une solution complémentaire mais non durable. Réparer les réseaux terrestres demeure une priorité pour garantir une connectivité stable et pérenne à la population. En ce sens, Orange et SFR ont successivement redémarré leurs antennes relais, couvrant progressivement toutes les communes de l’île, y compris les zones les plus reculées comme Acoua ou Mtsamboro.

Une mobilisation internationale pour faire face à la crise.

Outre les initiatives des opérateurs et de Starlink, l’ONG Télécoms Sans Frontières (TSF) a également joué un rôle clé dans la réponse à l’urgence. Spécialisée dans l’établissement de réseaux de téléphonie humanitaire, cette organisation paloise a déployé une équipe sur place dès les premiers jours qui ont suivi le passage du cyclone. Grâce à un réseau de wifi gratuit et des téléphones satellitaires, TSF a permis à plus de 900 habitants de se connecter et à une centaine d’entre eux de passer des appels prioritaires, notamment vers l’île voisine des Comores, où les communications restent coûteuses.

Emmanuel Jean, responsable communication de l’ONG, a souligné les défis spécifiques de cette mission : « Mayotte est une île isolée. Ce n’est pas simple d’y arriver ni de remettre les réseaux en route. » Cette intervention marque la première mobilisation de TSF sur le territoire français depuis la tempête Klaus en 2009.

Des enjeux bien au-delà des télécoms.

Si la connectivité est une priorité visible, les besoins de Mayotte vont bien au-delà des télécommunications. L’île, durement touchée par le cyclone Chido, fait face à une crise multidimensionnelle : accès à l’eau potable, énergie, nourriture, routes endommagées et services publics défaillants. Ces problématiques, qui affectent directement les conditions de vie des habitants, nécessitent une réponse coordonnée et globale. Les infrastructures télécoms, bien qu’essentielles pour la communication et la coordination des secours, ne sont qu’une partie de l’équation.

Les autorités locales, appuyées par l’État et plusieurs ONG, s’efforcent de répondre à ces multiples défis. Cependant, les critiques sur la lenteur des démarches administratives et la priorisation des actions continuent de faire débat. L’intervention de Starlink, bien que saluée pour son efficacité immédiate, a également mis en lumière les failles structurelles et les retards dans la modernisation des infrastructures de l’île.

Quelles perspectives pour Mayotte ?

À court terme, la priorité reste le rétablissement complet des réseaux de télécommunications et des autres infrastructures critiques. Les efforts conjoints des opérateurs locaux, des ONG comme Télécoms Sans Frontières, et des solutions d’urgence telles que Starlink devraient permettre à Mayotte de retrouver une certaine normalité dans les semaines à venir.

À plus long terme, cette crise soulève des questions sur la résilience des infrastructures dans les territoires ultramarins français. La vulnérabilité face aux catastrophes naturelles, combinée à des moyens souvent jugés insuffisants, appelle à une réflexion approfondie sur les investissements nécessaires pour moderniser et sécuriser ces régions. La polémique autour de Starlink pourrait ainsi servir de catalyseur pour repenser les priorités et les stratégies d’intervention en cas de crise.

Pour les habitants de Mayotte, la reconstruction est encore loin d’être achevée. Mais entre les efforts locaux et les interventions internationales, l’île peut espérer retrouver progressivement les moyens de surmonter cette épreuve et de mieux se préparer aux défis futurs.

Passionné par l'innovation technologique et les marchés financiers, Alex Martin décrypte les tendances qui façonnent notre avenir. Avec plus de 10 ans d'expérience en analyse économique et un regard aiguisé sur les révolutions numériques, il…